Colostrum, Aronia et Cie

20. avril 2020

 


Depuis le début de cette année, le Cahier des charges de Bio Suisse comporte pour la première fois des directives pour les compléments alimentaires (PDF, à partir de la page 296 du Cahier des charges 2020, partie III). Elles déterminent les exigences qui doivent être remplies pour pouvoir apposer le Bourgeon sur des préparations dosées comme des capsules ou des comprimés. Une nouveauté qui facilite l’accès au Bourgeon et qui permet d’ouvrir de nouvelles perspectives aux fabricants, transformateurs et commerçants de ce genre de produits. Une idée qui avait, par ailleurs, déjà traversé l’esprit du Comité de Bio Suisse en 2004 mais qui avait ensuite été abandonnée en 2008, entre autres pour des raisons d’image.

Dans le passé, il n’y avait en général que très peu de compléments alimentaires qui pouvaient obtenir le Bourgeon. Et c’était uniquement possible parce qu’ils entraient dans une catégorie de denrées alimentaires qui figurait déjà dans le Cahier des charges. Les produits à base de colostrum de la société zougoise Swiss Bio Colostrum en constituent un exemple classique. Il s’agit en fait simplement de poudre de lait à base de colostrum certifié de vache, de chèvre ou de mouton. L’ancienne interdiction générale valable pour les compléments alimentaires a ainsi pu être contournée de manière élégante pendant des années. Mais le jour où la société en question a demandé de fabriquer non seulement de la poudre de lait, mais aussi des capsules en qualité Bourgeon, les responsables de Bio Suisse ont d’abord répondu «niet!».
 

 

Colostrum


On trouve l’explication de cette position dans un document interne qui résume la nouvelle évaluation par Bio Suisse des compléments alimentaires datant des années 2014 et 2015. Le document précise que, en raison de la forme sous laquelle ils sont proposés, les capsules et comprimés donnent faussement l’image d’un effet sur la santé, lequel est potentiellement inexistant. De plus, la fabrication de comprimés est une transformation inutile qui recourt parfois à des substances de dragéification. La fabrication de capsules d’huiles a été évaluée comme emballage inutile. Le rapport est toutefois bienveillant par rapport aux produits qui ont un caractère d’ingrédients alimentaires normaux, transformés naturellement et avec ménagement. À l’exemple de la poudre d’algues, du jus d’herbe de blé, de la poudre d’acérola ou encore du concentré de carottes.

Si on met de côté les aspects transformation et emballage, c’est la question du dosage qui constitue un point critique. «Prenons l’exemple d’une simple boîte de lait en poudre. Il y figure peut-être une recommandation pour le consommateur mais c’est finalement moi qui décide, quelle quantité je mélange à l’eau et je bois», explique Simone Hartong, responsable de l’octroi des licences pour les compléments alimentaires chez Bio Suisse. Alors que pour les comprimés et les capsules, il s’agit d’indications d’utilisation spécifiques. «Il y est écrit qu’il faut prendre tant ou tant de comprimés par jour.» Par exemple pour renforcer le système immunitaire. Et c’est exactement là que se trouve la grande différence entre les compléments alimentaires et les aliments ou ingrédients alimentaires. C’est une autre raison pour laquelle Bio Suisse s’est longtemps montrée réticente à autoriser la fabrication de préparations de type pilules, malgré les demandes récurrentes de fabricants.

Argousier


Le changement de cap a commencé en 2017 avec l’entrée en vigueur de la nouvelle ordonnance fédérale sur les compléments alimentaires. Jusqu’alors, ces derniers faisaient partie des aliments spéciaux avec les vitamines et les substances minérales qui peuvent être ajoutées aux denrées alimentaires. Ce n’est qu’après cette séparation par le législateur que la Commission de la qualité de Bio Suisse s’est une nouvelle fois penchée sur cette thématique. Les responsables ont ensuite décidé d’intégrer à l’avenir les compléments alimentaires dans le Cahier des charges, ce qui a été le cas définitivement en 2019.

Un premier mémo a été publié en janvier de la même année, suivi du règlement y relatif qui est valable depuis janvier 2020. Il stipule entre autres que sont uniquement autorisés les produits à base de composants naturels, typiques pour des aliments. «Le caractère de denrée alimentaire doit être préservé», explique Simone Hartong. Elle cite l’exemple du chou-plume. On peut en sécher les fibres végétales puis les moudre ou les réduire en poudre. Il s’agit toujours de chou-plume avec tous ses composants mais il a simplement une autre allure.

Algues


D’autres procédés autorisés sont la distillation, la fermentation (par exemple levure de bière), le pressage (huile), la pasteurisation ou encore la micro-encapsulation. Certaines formes d’extraction sont également autorisées dans des solvants – doux, bien entendu – comme l’eau, l’alcool ou le CO2, explique Simone Hartong. «Ce qui est par contre complètement impossible, c’est l’extraction ou l’isolation d’un composant précis, comme par exemple une vitamine, car il ne s’agit ensuite plus d’une denrée alimentaire.»

À l’inverse, il est impossible d’ajouter des vitamines, des substances minérales, des oligo-éléments ou d’autres éléments nutritifs dans un complément alimentaire. «Et encore moins s’ils sont chimiques ou de synthèse», ajoute Simone Hartong. C’est de toute façon un principe fondamental. De plus, les denrées alimentaires Bourgeon contiennent naturellement assez de vitamines et d’éléments nutritifs. Les enrichir ne serait donc pas sensé. La Commission Bio Suisse de labellisation de la transformation et du commerce trouve tout aussi insensé d’autoriser les comprimés effervescents. Elle a refusé cette forme galénique, parce qu’il faudrait encore d’autres additifs et que les comprimés normaux lui paraissaient suffisants.

Aronia


Il existe actuellement deux entreprises qui fabriquent et commercialisent des compléments alimentaires certifiés Bourgeon. Il y a la société déjà mentionnée Swiss Bio Colostrum avec ses produits à base de colostrum, mais aussi la société lucernoise Progress avec une poudre de baies d’aronia. Et c’est déjà tout pour le moment. «Le fait que nous n’ayons pas encore fait beaucoup de publicité pour ces nouvelles possibilités au sein de la branche y est sûrement pour quelque chose», dit Simone Hartong. Le marché existerait. L’offre de compléments alimentaires biologiques qui est actuellement disponible le montre, ne serait-ce que si on regarde les capsules d’açaï ou les comprimés d’argousier. «Personnellement, je vois un grand potentiel pour la transformation fermière. Les entreprises agricoles pourraient aussi fabriquer par exemple des poudres de fruits ou de légumes.»

Contact: simone.notexisting@nodomain.comhartong@bio-suisse.notexisting@nodomain.comch, tél. 061 204 66 52

Texte: René Schulte, Bio Suisse/Bioaktuell
Images: Sewcream/depositphotos.com; TinaStudio/www.tina-studio.com (CC BY-SA 3.0, cropped); rcpsi/depositphotos.com; AntonMatyukha/depositphotos.com; Goran Horvat/pixabay.com
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