Voici comment entretenir le sol sans produits chimiques

15. mai 2023

Géo Trouvetou se serait bien amusé avec Herbert Schär. En effet, l’agriculteur d’Amriswil (TG) aime bricoler dans sa vie. Il est passionné par l’entretien en douceur du sol, et des méthodes et machines spéciales sont nécessaires à cet effet. L’homme, originaire de Thurgovie, raconte comment il maintient son sol vivant et parvient à entretenir les pelouses sans produits chimiques.

Comment êtes-vous devenu expert en sols?

À la fin des années 1990, j'ai commencé à pratiquer l'agriculture biologique sans labour. Au fil des ans, j’ai appris certaines choses en assistant à des formations et en lisant des articles spécialisés. J’en ai également appris grâce au travail pratique. C’est de là qu’est née ma méthode de culture.

Herbert Schär
Herbert Schär renonce à l'utilisation d'auxiliaires chimiques.
(Bio Suisse)

À quoi renoncez-vous par rapport à un agriculteur qui travaille de manière conventionnelle?

En tant qu’agriculteur bio, je renonce à certains intrants généralement utilisés dans l’agriculture conventionnelle. Certes le rendement est moins élevé, mais cela a un effet positif sur l’environnement. Par exemple, je remplace en grande partie le lisier par le compost issu de ma ferme. Je n’utilise pas non plus de charrue classique. Je ne procède pas à une préparation en profondeur sur toute la surface. J’ai transformé, à la place, une charrue en charrue plate qui ne ruine pas mon travail du sol.

Vous utilisez des machines spécialement conçues pour répondre à vos besoins. Pourquoi?

Ma méthode consiste à faire en sorte que les nutriments disponibles restent autant que possible dans les plantes. Il s’agit principalement de l’azote. Chaque mesure prise en agriculture a des répercussions. Chaque traversée a des répercussions, notamment sur les terres arables dont les sols ont été assouplis. Une grande quantité d’azote est ainsi libérée. S’il n’est pas disponible en abondance, ce nutriment fait défaut pour l’alimentation des plantes cultivées, et il nuit également à l’environnement. Mes machines sont conçues pour être utilisées sur des surfaces planes (profondeur de 10 cm au plus). Cela me permet de retenir une grande partie de l’azote dans le sol.

Wiese auf dem Hof von Herbert Schär
Voici à quoi ressemble une prairie de la ferme d'Herbert Schär, qui pousse sur un sol vivant.
(Bio Suisse)

Pas de labour, pas de produits chimiques – comment fonctionne donc le système de culture ?

Pour exploiter avec succès la méthode de culture sans labour sans utiliser d’herbicides, il est nécessaire d’opter pour une diversité dans la variété. Les cultures estivales et hivernales sont cultivées en alternance. La rotation des cultures est choisie de manière à ce que la culture précédente fournisse à la culture suivante ce qui favorise sa floraison ou qui du moins ne l’empêche pas. Les bandes de prairie artificielles dans les champs divisent ces cultures en blocs de cultures. Ces blocs sont praticables avec des machines lourdes telles que l’épandeuse de compost, machines permettant l’exploitation des blocs de culture.

Faisons un instant le parallèle entre le champ et la pelouse tel que le jardin nous le fait voir. Plus fondamentalement: que pensez-vous d’une pelouse?

Les pelouses sont, dans les faits, une catastrophe écologique. Premièrement, il n’y a pas de place pour la biodiversité. Deuxièmement, elles entraînent la libération d’une grande quantité d’azote et de CO2. Troisièmement, la tonte de pelouses nécessite une quantité relativement importante d’énergie. Que la tonte se fasse avec un robot qui circule presque sans arrêt sur le site ou que la pelouse soit entretenue à l’aide de la machine dédiée, les dépenses en termes d’énergie, d’argent et de temps sont élevées.

«Les pelouses sont, dans les faits, une catastrophe écologique»

Quelle est donc la meilleure façon possible d’entretenir une pelouse?

Seule la surface utilisée devrait être tondue. Les herbes coupées doivent être laissées à terre. Sinon, elles peuvent servir d’engrais pour les lits de jardin ou être entassées pour former du compost. Ces déchets ne font pas partie des ordures à incinérer. La surface qui n’est pas utilisée comme pelouse constitue un champ de fleurs. La splendeur des fleurs ainsi que le bourdonnement et le grésillement des insectes peuvent transformer cette parcelle en un véritable bout de paradis. Si des arbres et arbustes s’y trouvent, des passereaux y feront certainement rapidement leurs nids. La pelouse et le champ de fleurs deviennent alors complémentaires.

Quelles erreurs faut-il absolument éviter lors de l’entretien de pelouses?

Pour préserver les ressources, il faut économiser l’argent des engrais pour pelouse et laisser de temps en temps les herbes coupées sur place comme engrais. À cet égard, il est plus efficace de tondre par temps nuageux avant la pluie car il y a moins de sève qui s’évapore à ce moment précis. Ainsi, l’azote est libéré en faible quantité dans l’air et sert à fertiliser la pelouse.

«Pour préserver les ressources, il faut économiser l’argent des engrais pour pelouse et laisser de temps en temps les herbes coupées sur place comme engrais»

Revenons un instant sur votre ferme. Vous allez bientôt prendre votre retraite. Qui s'occupera alors du sol et que ferez-vous?

À bientôt 64 ans, je suis heureux que mon fils Markus et sa femme Lilly reprennent la ferme. Je resterai cependant sur l’exploitation, mais à un rythme moins soutenu. Markus et moi avons la même conception des choses. Le sol est plus qu’un simple site de production. Le sol c’est la terre, et donc l’espace qui regorge de petits animaux, de champignons et d’autres microbes. Ils fournissent les nutriments pour nos cultures vivrières et plantes fourragères. Nous sommes issus de la terre, c’est elle qui nous donne de quoi vivre avant de redevenir poussière.

Texte et images: Oliver Roscher

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